Bénis l’esprit brisé des souffrants,
La lourde solitude des hommes,
L’être qui ne connaît nul repos,
La souffrance qu’on ne confie jamais
A personne...
Bénis la misère des hommes
Qui meurent en cette heure.
Donne-leur, mon Dieu, une bonne fin.
Bénis les cœurs, Seigneur,
Les cœurs amers.
Avant tout donne aux malades le soulagement.
Enseigne l’oubli à ceux que tu as privés
de leur bien le plus cher.
Ne laisse personne sur la terre entière
Dans la détresse.
Bénis ceux qui sont dans la joie,
Seigneur, protège-les.
Moi, tu ne m’as jamais, à ce jour,
Délivrée de la tristesse.
Elle me pèse parfois beaucoup.
Néanmoins, tu me donnes ta force
Et je peux ainsi la porter.
Ainsi soit-il.
© Edith Stein, « Prière du Vendredi Saint 1938 » , in Malgré la nuit, poésies complètes, Ad Solem, 2002